Pièce montée d’Aline Blanche : La grande gâterie du quotidien

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Chez Procédés Chénel International, on ne joue pas avec la nourriture, mais on la détourne avec un appétit vorace pour l’art. Fondée en 1896, cette entreprise française, spécialiste des « architectures de papier », avait décidé en mai 2024 de régaler les yeux plutôt que l’estomac avec une exposition sur le thème de la gourmandise. Au menu : une dizaine d’artistes triés sur le volet, et en pièce de résistance, l’œuvre d’Aline Blanche. Son chef-d’œuvre du jour ? Une pièce montée. Enfin, presque.

Ici, point de nougatine ni de choux caramélisé – la recette d’Aline Blanche repose sur des boîtes d’œufs en carton mouflé. Une centaine, empilées avec une rigueur d’orfèvre, à la manière d’un pâtissier sous amphétamines. Le tout culminant à près de deux mètres de haut, comme un mille-feuille d’objets du quotidien revisitant les codes du monumental. « C’est un assemblage brut de boîtes 100 % papier », confie l’artiste, sourire en coin. Comprendre : du recyclage à la sauce conceptuelle, où l’ordinaire devient extraordinaire.

Selon le Dictionnaire de l’Académie française, une pièce montée est une pâtisserie décorative, souvent architecturale. Parfait : Aline Blanche en a fait un totem bancal du quotidien, un édifice en équilibre précaire entre la mémoire et l’éphémère. Ce jeu de construction, bien loin des macarons pastel et des pralines dorées, s’inscrit dans son exploration de l’identité et de l’hybridation. Avec ses accumulations de théières en céramique, elle compose un festin d’objets rescapés, des banquets visuels aux parfums de nostalgie.

Depuis les années 2010, Aline Blanche recycle avec appétit : affiches d’exposition arrachées dans le métro, éléments glanés dans la rue, morceaux de vie digérés puis recrachés sous forme d’œuvres. Ce mille-feuille matériel interroge notre rapport à l’environnement, à l’accumulation, à la frénésie de consommation. Car sous son apparence de gâteau en carton, cette pièce montée est aussi un miroir tendu à nos sociétés modernes, où l’identité se bricole, où l’héritage s’ingère et se transforme en de nouvelles saveurs.

Quant à la verticalité de ses œuvres, elle oscille entre l’élévation mystique et le risque de l’effondrement. Comme une tour de Babel culinaire où chaque ingrédient, chaque souvenir, chaque débris raconte une histoire. Ses sculptures ne sont pas de simples empilements : elles sont digestes, nourrissantes et questionnent notre monde jusqu’à l’indigestion. Avec un humour absurde et une poésie brute, Aline Blanche prépare un festin où la mémoire se déguste en bouchées empilées. Bonne dégustation !

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