Robert Doisneau au musée Maillol, une vie en noir et blanc

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Atelier Robert Doisneau

Icône de la photographie humaniste, Robert Doisneau s’invite au musée Maillol à Paris jusqu’au 12 octobre 2025. L’exposition “Instants donnés” retrace le regard tendre, facétieux et engagé que le photographe a porté sur son époque, à travers des clichés emblématiques ou méconnus.

Toute ma vie je me suis amusé, je me suis fabriqué mon petit théâtre.” Robert Doisneau faisait preuve d’une irrépressible joie de vivre. Clin d’œil du destin, il s’est éteint à Paris un jour de 1er avril 1994. Jusqu’au 12 octobre, le Musée Maillol lève le rideau sur l’œuvre du photographe avec l’exposition “Instants donnés”. Quelque 400 clichés ont été soigneusement sélectionnés parmi les 450 000 négatifs capturés par l’artiste. Une collection impressionnante qui continue de s’agrandir. Francine Deroudille, sa fille, a découvert par hasard l’un de ses clichés au détour d’un stand du marché aux puces à Paris. Au premier plan, on y voit une pancarte “J’achète tous les oiseaux”, devant des cages vides. “D’ailleurs je trouve que ça serait un titre d’exposition formidable”, sourit-elle au micro de France inter, le 17 mai dernier. Une image qui illustre la philosophie de l’artiste entre curiosité, désobéissance et émerveillement.

Le Paris en noir et blanc de Robert Doisneau

La photo a fait le tour du monde. Son nom : Le baiser de l’hôtel de ville, un cliché de deux jeunes parisiens, saisi en 1950. “C’est le symbole d’un moment heureux” confiait alors Robert Doisneau. Le photographe a posé son regard poétique sur le Paris insouciant et heureux. Il raconte aussi son côté sombre. Muni de son appareil photographique, il documente la grande pauvreté d’après-guerre, sans tomber dans le misérabilisme. C’est le Paris qu’il a vécu durant toute sa jeunesse. Ce n’est pas une coïncidence si l’exposition s’ouvre sur le thème de l’enfance, période chère au photographe. “Lui n’en a pas eu” confie sa fille auprès de TV5 Monde, le 12 mai. “Toute cette enfance lui a été confisquée. Alors dès qu’il a un appareil photo, il se précipite vers les enfants libres” raconte Francine Deroudille. En effet, Robert Doisneau est né en 1912 à Gentilly, deux ans avant que la guerre n’éclate. Son père part au front. Il ne le découvre qu’en 1918. Deux ans plus tard, sa mère meurt de la tuberculose. 

Dans l’œil du photographe : l’enfance, les artistes, les écrivains, les banlieues… 

L’enfance l’inspire autant que les artistes. Utrillo, Braque, Picasso : tous ont posé devant son objectif. Mais l’œuvre de cet ancien étudiant en photogravure à l’école Estienne reste ancrée dans le réel. Instants “chipés”, puis donnés, Robert Doisneau déambule dans les rues de la capitale à la recherche des moments banals du quotidien. Des moments d’une poésie brute qui composent également sa vie. Il a connu la guerre, la galère. Licencié en 1939 de son poste de photographe industriel chez Renault pour ses retards répétés, Robert Doisneau se tourne vers les idéaux du Front populaire. Il devient indépendant et signe ses premiers reportages dans la presse, notamment pour le prestigieux magazine Vogue. Son travail reçoit de nombreuses distinctions. Robert Doisneau conserve un esprit de résistance tout au long de sa carrière, lui qui avait, pendant la Seconde Guerre mondiale, donné ses papiers à un Juif polonais traqué par les Allemands.