Parade : la joyeuse ménagerie de Stefan Rinck s’installe à Chamarande

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Jusqu’au 28 septembre 2025, le Domaine départemental de Chamarande dans l’Essone, invite le sculpteur allemand Stefan Rinck à investir le parc et l’orangerie. Entre monstres rococos et animaux-clowns, l’exposition « Parade » fait dialoguer mythes médiévaux et humour pop dans un théâtre de pierre grandeur nature.

Deux géants de près de trois mètres accueillent le visiteur au sein des allées classées « Jardin remarquable » : un chien à collerette brandissant un masque humain et un crocodile velu serrant une marionnette de bouffon. Sculptées main dans la Pietra Leccese, leurs surfaces portent encore les coups de burins pour rappeler l’effort primitif du tailleur de pierre. Ces figures inaugurales résument l’univers de Stefan Rinck : un mélange de bestiaire de roman, de grotesque baroque et de pop culture. Leur nez rouge de clown annonce la couleur : ici le rire sert de miroir aux figures d’autorité, à l’image du Ballet des Fées des Forêts de Saint-Germain qui inspira l’artiste : spectacle où Louis XIII lui-même jouait les diables en pourpoint étincelant.

Stefan Rinck, un registre carnavalesque
L’orangerie prolonge la mascarade dans un écrin bordeaux théâtral. Sur un long socle central se dresse une troupe d’une dizaine de sculptures monumentales, taillées dans un patchwork de marbre blanc, de diabase noire ou de grès rouge. Bookhead (2021) arbore une raie-livre qui fend son crâne, Croc Pope (2024) parade en tiare pontificale, tandis que Cardinal Bodo (2025) scrute la salle d’un œil moqueur. Autour, une galerie de dessins à l’encre et au pastel peuple les murs de créatures attendrissantes et cruelles. Rinck interroge la frontière entre sauvage et civilisé : en affublant l’animal du costume humain, il élimine les artifices qui séparent la cour de la jungle.

« Bouffon du roi » autoproclamé

Stefan Rinck détourne la doxa historique pour railler nos mythes de progrès. Sa Parade s’inscrit dans le cycle « Qui veille sur les lieux ? » du Domaine de Chamarande : un dialogue entre génie protecteur et esprit moqueur. Sur les cent hectares du site, sculptures en plein air, visites contées et ateliers familiaux (du 7 juin au 20 août) font résonner ce peuple de pierre avec la nature alentour. Entre la forêt du Belvédère et la vallée de la Juine, Stefan Rinck rappelle, avec un humour taillé au burin, que l’ennui reste le plus mortel des péchés.

>Pour plus d’informations, rendez-vous sur le site du domaine de Chamarande

Serge Berry